Guerre — 15 novembre 1942.
Le manoir de Lancessourie à Saint-Jean-le-Thomas était alors la propriété de mes grands-parents maternels. Ma mère avait quitté Paris pour s’y réfugier après que mon père fut fait prisonnier de guerre par les Allemands et envoyé dans l'un de leurs oflags à chiffre romain pour y travailler.
C’est dans ce contexte que je suis née, le matin du 15 novembre 1942.
En valse avec Pascale, mes parents m’avaient finalement appelée Dominique, et cela bien avant ma naissance. Un prénom mixte, convenant à toute éventualité.
Quelque temps après mes premiers mois, ma mère, exilée, nous ramena à Paris. Mais la situation s'étant aggravée, elle eut si peur pour moi qu'elle me renvoya rapidement chez mes grands-parents de Saint-Jean.
Dès lors, deux ans devaient s'écouler avant nos retrouvailles.
De cette époque sans mes parents, une seule image me vient en tête, mieux que nette : le regardant dans l’embrasure d’une petite fenêtre, mon grand-père se rase avec son coupe-choux.
Certes, rien d’extraordinaire, une chose banale et probablement façonnée et refaçonnée par mon esprit après toutes ces années. Mais c'est pourtant très clair. Si bien que si vous me demandiez quel est mon tout premier souvenir, c’est de celui-ci que je vous parlerais.
Début 1944, mon père fut finalement libéré comme soutien de famille au motif qu’il avait de nombreux frères et sœurs dont il fallait s'occuper. C’est à la seconde femme de mon grand-père paternel que nous devons cette libération prématurée, une femme au demeurant pas tout à fait recommandable, mais loyale en souvenirs.
Libre et Parisien, mon père retrouva ma mère, qui hébergeait alors des membres de sa famille, son frère et sa sœur, ma tante Jeannette et mon oncle Michel, pour leur permettre de poursuivre leurs études. Même en temps de guerre, rien ne se perd !
En août de cette même année, que nous appellerons plus tard « La Libération », la majeure partie de la population de la ville se mit en tête de quitter Paris.
Ça canardait dans tous les coins, les bombes tombaient sur de nombreuses usines. Mes parents ne firent pas exception à l'instinct et s’employèrent, eux aussi, à quitter la ville pour me rejoindre à Saint-Jean, quels qu'en fussent les moyens.
Et c’est dans une espèce de grand chambardement que mon père mit ma mère, ma tante Jeannette et leur bicyclette, dans un camion vers une destination qui devait écourter les 350 km qui les séparaient de Saint-Jean.
Ayant finalement été déposés assez loin d'une petite commune normande, ils durent terminer le voyage avec la bicyclette qu'ils avaient apportée. Malins. Même si je ne l'ai jamais vue, je la vois, cette drôle d'image de mes parents, cavaler vers un but, de Normandie en fin de fond de Bretagne.
En route et épuisés, ils mouillèrent tout de même un moment à Dragey-Ronthon chez un couple d’amis pour se faire offrir à boire et se reposer avant de reprendre la route vers le domaine. C'était déjà un sacré bout de chemin ! Le plus court pour la fin.
C'est durant cette pause, figurez-vous, qu'ils firent, surpris, la connaissance d’un petit bout de chou qui n’avait alors pas tout à fait deux ans et qui, à ce jour-là, fit la connaissance de ses parents revenus le chercher.
Ce bout de chou, c’était moi !
Je ne me souviens plus précisément par quel incroyable hasard mes grands-parents avaient décidé de rendre visite à ce couple d’amis, mais le destin voulait manistement se hâter de concrétiser nos retrouvailles.
Je pus enfin revoir ma mère pour la première fois et connaître mon père. Je ne sais pas ce que cela m'a fait, mais ce ouï-dire fera la postérité.
En fin de compte, mes parents mirent près 48 heures pour rejoindre le manoir de Lancessourie.
Pepito
14 jours
Pfff ... C'est mou... 🙂
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C’est férié! Les enfants ne laissent aucun répit…
C’est férié! Les enfants ne laissent aucun répit…